Chaque année, l’employeur doit remettre au comité d’entreprise, ou à défaut aux représentants du personnel, des informations sur la situation comparée  des conditions d’emploi et de formation des hommes et des femmes dans l’entreprise. Voici quelques clés pour comprendre la situation nationale en matière d’égalité professionnelle et la législation applicable.

Quelques chiffres : voici quelques données marquantes, issues de l’édition 2021 des chiffres clés publiés par le ministère des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes.

Un taux d’emploi plus faible chez les femmes dans la population des 15 ans et plus : 55 % d’hommes contre 46,9 % de femmes. L’écart est encore plus important dans le cas des populations immigrées ;

Une surreprésentation des femmes ou des hommes dans certains métiers: 97,7 % des aides ménagères, des aides à domicile et assistant(e)s maternel(le)s sont des femmes. Les femmes représentent 97,6 % des secrétaires et 2,1 % des ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment ;

Des inégalités salariales persistantes : à temps plein, les femmes perçoivent un salaire net inférieur de 19,2 % en moyenne à celui des hommes dans les secteurs publics et privés. Cet écart grimpe à 39,5 % dans les activités financières et d’assurance ;

Un accès inégal aux fonctions qualifiées : 14,6 % des femmes « actives » sont des cadres, occupent des professions libérales, intellectuelles ou artistiques, contre 20,2 % des hommes « actifs ». 27,3 % des actives occupent un emploi non qualifié, contre 14,8 % des actifs.

Pour mémoire, la législation prévoit que l’employeur est tenu d’assurer pour un même travail, ou un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes : cette obligation interdit toute différenciation de salaire fondée sur le sexe. Formation, classification, promotion, mutation, congé, sanction disciplinaire ou licenciement : aucune décision de l’employeur ou clause de convention ou d’accord collectif ne peut prendre en compte l’appartenance à un sexe déterminé.

Le législateur a fait de la négociation collective le principal levier pour inciter les entreprises à corriger les écarts existants.

Par ailleurs, il est interdit de refuser d’embaucher une personne en considération du sexe, de la situation de famille ou de la grossesse ou sur la base de critères de choix différents selon le sexe, la situation de famille ou la grossesse.

Les seules exceptions sont précisées dans l’article R. 1142-1 du Code du travail, qui fixe la liste des emplois et des activités professionnelles pour l’exercice desquels l’appartenance à l’un ou l’autre sexe constitue la condition déterminante, comme les artistes appelés à jouer le rôle d’un homme ou d’une femme, ainsi que les mannequins chargés de présenter des vêtements et accessoires.

Les obligations des entreprises

Les entreprises de plus de 50 salariés doivent réaliser trois actions pour être en conformité avec la loi :

  • Réaliser un diagnostic mettant en lumière les écarts qui existent entre la situation des femmes et des hommes ;
  • Établir un plan d’action à partir de ce diagnostic ;
  • Négocier un accord relatif à l’égalité professionnelle.

Une fois ces trois conditions remplies, elles doivent :

  • Réactualiser chaque année le diagnostic et le plan d’action dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire ;
  • Renouveler la négociation tous les trois ans.

Si ces conditions ne sont pas remplies, les entreprises de plus de 50 salariés ne peuvent pas soumissionner à des marchés publics, à des concessions de travaux publics, à des contrats de partenariats ni à des délégations de services publics.

Voilà pour les principes, simples a priori. En pratique, l’application de la législation est un peu plus ardue.

Le rapport annuel de situation comparée

Ce rapport est un outil très utile pour engager la négociation. Dans les entreprises de 300 salariés ou plus, l’employeur soumet ce rapport pour avis au comité d’entreprise ou à défaut, aux délégués du personnel, le cas échéant par l’intermédiaire de la commission égalité professionnelle (article R2323-12 du Code du travail).

Dans les entreprises de moins de 300 salariés, l’employeur remet au comité d’entreprise un rapport sur la situation économique de l’entreprise, qui inclut entre autres la situation comparée des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes (article R2323-9).

Les textes applicables :

Loi n° 83-635 du 13 juillet 1983  : elle prévoit la production d’un Rapport annuel sur la Situation Comparée des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes dans les entreprises.

Loi n°2001-397 du 9 mai 2001, dite loi « Génisson » : elle exige que le Rapport de Situation Comparée intègre des indicateurs chiffrés définis par décret et prévoit une obligation de négocier pour les branches et les entreprises.

Loi n°2006-340 du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes : elle renforce l’obligation de négocier des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération avant le 31 décembre 2010.

Décret n°2008-838 du 22 août 2008 : modifie les indicateurs figurant dans le Rapport annuel sur la Situation Comparée des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes dans les entreprises de 300 salariés et plus.

Loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes :  voir plus bas, dans « négociations annuelles obligatoires ».

Les indicateurs de ce rapport doivent permettre d’identifier les écarts, d’en analyser les causes et de recenser les actions menées au cours de l’année écoulée. Les objectifs et les actions prévus dans l’année à venir doivent également figurer dans les informations présentées par l’employeur.

Les thématiques abordées sont les suivantes :

  • Conditions générales d’emploi ;
  • Rémunérations ;
  • Formation ;
  • Conditions de travail ;
  • Congés ;
  • Organisation du temps de travail dans l’entreprise.

Le rapport doit pouvoir être fourni par l’employeur à tout salarié qui en fait la demande.

Les négociations obligatoires

La loi prévoyait auparavant une négociation annuelle sur l’égalité professionnelle et une autre sur l’égalité salariale et la suppression des écarts de rémunération. La loi du 4 août 2014 impose désormais une négociation annuelle unique portant sur les « objectifs d’égalité professionnelle et salariale entre les femmes et les hommes dans l’entreprise, ainsi que sur les mesures permettant de les atteindre « .

Cette loi inclut les restrictions d’accès aux marchés publics en cas de manquement à ces règles.

Trop compliqué ?

La loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi apporte de nouvelles précisions (censées simplifier l’exercice…).

Premièrement, l’obligation de négociation reste annuelle, même s’il existe un accord d’entreprise définissant objectifs et mesures en matière d’égalité professionnelle et salariale. Cependant (puisqu’on vous dit que c’est simple), il sera désormais possible aux entreprises dotées d’un accord en matière d’égalité professionnelle, ou, à défaut d’accord, d’un plan d’action unilatéral, de modifier la périodicité et le regroupement des thèmes de l’ensemble de leurs obligations en négociant un accord d’entreprise majoritaire.

Cette loi, que nous avons déjà eu le loisir d’évoquer, modifie les obligations d’information et de consultation du comité d’entreprise.

Vous faites partie d’un comité d’entreprise ? Vous participez à un CE ou vous voulez connaître les droits du CE ? Voici un résumé !

Depuis le 1er janvier 2016 :

  • L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes a été intégrée dans le champ de la consultation annuelle sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi, soit une des trois grandes consultations annuelles du comité d’entreprise ;
  • La base de données économiques et sociales qui constitue le support de ces consultations devra désormais obligatoirement contenir une rubrique dédiée sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise ;
  • Le comité d’entreprise pourra désormais se faire assister d’un expert technique afin de préparer cette consultation.

Les sanctions prévues

Les entreprises d’au moins 50 salariés non couvertes par un accord relatif à l’égalité professionnelle ou, à défaut d’accord, par un plan d’action intégré au rapport de situation comparée sont soumises à une pénalité financière. Le montant de la pénalité, fixé au maximum à 1 % de la masse salariale, est fixé – à l’issue d’une procédure d’échanges contradictoires entre l’entreprise et l’inspection du travail – par la DIRECCTE au regard des efforts constatés de l’entreprise en matière d’égalité salariale et des motifs de son éventuelle défaillance. Son produit est affecté au fonds de solidarité vieillesse (FSV).

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